Sep 6, 2015

P... pourquoi mon fusil s'est enrayé?

L'exécution de Maximilien - National Gallery - 07-2015

Je me pose devant L'exécution de Maximilien de Manet. C'est un tableau monumental. Je m'assois et regarde. J'observe les personnages.

Le tragique de la composition n'est pas à gauche, du côté de l'homme qu'on exécute, mais à droite, du côté du soldat qui inspecte son arme. 

Le fusil n'a pas fonctionné.

"Qu'est-ce qui se passe avec mon fusil?" semble se dire le soldat, tout attentif au mécanisme enrayé de la culasse de l'arme, quand à cinq mètres de lui un homme tombe sous les balles du peloton d'exécution. 

"Bon sang, mais qu'est-ce qui se passe avec ce maudit fusil?"

La poitrine de Maximilien est déchiquetée à bout portant par l'acier brûlant.

"Pourquoi mon fusil s'est enrayé?"

Qui a exécuté Maximilien? Personne et tout le monde à la fois me dit monsieur Manet ! C'est la machine judiciaire qui a tué. C'est personne. La recopie mécanique de six mêmes têtes coiffées du même chapeau pour les soldats du peloton d'exécution m'évoque l'anonymat des bourreaux, le dépersonnalisation de l'exécution. Comment d'ailleurs l'administration judiciaire pourrait-elle trouver des bourreaux si elle ne dépersonnalisait pas l'exécution? Cagoule, uniforme, partage des responsabilité dans le groupe.

"Pourquoi mon fusil s'est enrayé?"

L'homme ne semble même pas soulagé d'avoir été écarté du meurtre par l'enrayement de l'arme.

Au loin, dans l'arrière plan du tableau, le monde s'étend immense et pur par-delà l'horizon bleu. Un monde dont on va priver à jamais Maximilien.

De quel droit peut-on priver un homme des horizons bleus du monde?

Manet nous dit peut-être que la peine de mort est le signe d'une humanité enrayée.

Aubevoye 09/2015





No comments: