Encre, stylo Muji et acrylique - 10/2016
Emilie se
tenait debout devant la fenêtre et perdait son regard dans le soir
de la rue maintenant calme. Sur les rideaux de fer abaissés des
boutiques endormies, les lumières des décorations de Noël tendues
entre les façades, taguaient des graffes éphémères et colorés.
Une voiture passa en trombe et tourna au coin de
l’épicier ; le silence de la rue
se réinstalla. La maison était sombre et paisible. Il y eut le vouff
du déclenchement de la chaudière dans la cuisine, le plic-ploc
continu du radiateur tiède sur lequel Emilie
avait posé ses deux mains; petits bruits familiers perdus dans
le temps immobile de l'Avant.
Emilie
voyait son propre reflet sur la vitre, ses cheveux dénoués, les
guirlandes clignotantes du sapin de Noël derrière elle dans le
salon, et la robe d’été qu’elle portait. Au cœur de l’hiver,
Emilie avait passé ce soir une petite robe d’été, simple, fraîche et modeste. Dehors sur le trottoir, une femme marchait à pas rapides et décidés, doudoune Annapurna, boots fourrées et téléphone à
l’oreille. Des petits ballonnets de vapeur blanche s’échappaient de la
capuche de la passante et filaient dans son sillage; éclats de
voix de la femme se croyant seule dans le froid piquant de la rue.
Emilie
glissa un CD dans le lecteur et enfonça la touche Play.
Un air de musique insouciant et nostalgique envahit la pièce. Elle
déchaussa ses escarpins en deux coups de talons et se mis à danser pieds nus sur le tapis. La robe d’été se relevait en corolle dans le
tournoiement de la danse, découvrant une petite culotte de coton ordinaire et troublante.
Ivre de ses soleils, Emilie tournait, tournait et tournait encore,
souriant aux beaux jours qui débouleraient dans quelques mois.
Aubevoye 10/2016
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